Voici un exemple tout personnel de carnet de griffonnages thérapeutiques que l’on peut mettre en œuvre quand on fait face à une situation difficile.

Un carnet de griffonnages thérapeutiques ?

C’est le nom « très ordinaire » que j’ai donné à une façon, « très ordinaire » elle aussi, d’allier griffonnages et résilience.

Quand on parle d’art, 99 % des personnes – j’en ai fait partie – pensent aux (très) grands artistes qui ont peuplé l’histoire de l’Humanité : Léonard de Vinci, Botticelli, Rembrandt, et ainsi de suite… Généralement, la deuxième pensée qui suit celle-ci est de se dire que ces personnes sont des exceptions grandioses et que jamais nous ne pourrions personnellement prétendre atteindre un tel niveau artistique.

C’est une infime petite fenêtre par laquelle nous percevons l’art. Et c’est bien dommage car nous nous coupons de nos propres sens artistiques qui, pourtant, nous aident à guérir. Les neurosciences, aujourd’hui, nous le prouvent régulièrement : avoir une démarche artistique quelle qu’elle soit nous fait du bien, nous aide, nous guéri. Un exemple ICI.

Il ne devrait pas y avoir de place ici pour la comparaison (untel est un artiste/untel n’est pas un artiste) ; mais, je suis consciente pour l’avoir traversé, que faire taire ce censeur intérieur prends parfois du temps.

L’art est aussi dans des petites choses, des petits actes, des petits griffonnages, dans un quotidien simple et « ordinaire ».

Redécouvrir la puissance de l’« ordinaire », la nettoyer des scories d’une éducation élitiste loin de l’humain, du vivant, est important pour s’ancrer dans sa vie et la vivre pleinement.

Voilà pourquoi j’ai choisi de parler de carnet de griffonnages thérapeutiques, sans employer de grands mots savants des conceptions dogmatiques de l’art-thérapie.

J’ai éminemment de respect pour ces petits griffonnages qui font du bien, qui soignent, qui libèrent et qui permettent à l’être de s’exprimer. Chacun de nous peut mettre en œuvre ce genre d’actions guérisseuses.

Origine de ce carnet de griffonnages thérapeutiques

Le 6 mars 2021, un de nos chats, Olympe, était victime d’un grave accident. Tous ceux qui me connaissent savent à quel point les animaux, et, tout particulièrement les chats, ont de l’importance dans mon existence. Durant plusieurs semaines, son pronostic vital a été engagé, ce qui a été très bouleversant pour ma famille et moi-même.

Qui plus est, cet accident a eu lieu le jour de mon anniversaire… renforçant encore plus, si nécessaire, le lien que j’ai avec elle. Je crois que c’est un des anniversaires les plus douloureux de mon existence.

Le soir même du jour où a eu lieu l’accident, après l’avoir laissé chez notre vétérinaire, j’ai commencé ce carnet, spontanément. Il était sur mon bureau, inutilisé depuis plusieurs mois que je l’avais acheté pour une occasion spéciale.

Je l’ai ouvert, j’ai pris mes pinceaux et mes couleurs, et j’ai commencé à dessiner/peindre des chats.

Je l’ai terminé, à quelques heures près, le 6 mars 2022, soit un an jour pour jour après cet accident.

L’intérieur du carnet thérapeutique

Les productions sont très inégales ; certaines me semblent très jolies, d’autres moins. Du point de vue artistique, toutes mon permis de tester des outils que je n’avais pas encore vraiment utilisés : feutres de toutes sortes (fins, de calligraphie, à encre, à gel, dorés/argentés/cuivrés/couleurs bronze…), encre aquarelle, encre acrylique, gouaches dorées, et ainsi de suite.

Je me suis régalée à explorer des formes, des mouvements, des idées, au fil des nombreuses pages. Certaines idées sont fantastiques et pourront être ré-utilisées, d’autres le sont moins et c’est très bien ainsi.

Leur production n’était de toutes les façons pas vraiment tournées vers la réalisation d’un chef d’oeuvre ! Peu m’importait et m’importe encore que je/qu’on les trouve jolies ou pas.

A la fin, je l’ai complètement recouvert de peinture dorée (à la bombe).

Il fait indéniablement partie de mes créations artistiques qui me sont précieuses et que je garderai tout le temps.

L’apport, au final, du carnet de griffonnages thérapeutiques

Il est immense.

Durant le temps où Olympe était entre la vie et la mort, il a nourri, soutenu, et amplifié mon lien avec elle, mon espoir qu’elle s’en remette et revienne parmi nous. Il m’a permis d’exprimer par le dessins mon amour pour elle, ma crainte qu’elle ne s’en sorte pas et m’a permis de me raccrocher au fil ténu de l’espoir, ce qui est bien plus créateur de belles conséquences que d’avoir broyé du noir et repassé en revue tous les animaux fantastiques qui ont fait partie de ma vie et l’ont quittée dans de plus ou moins bonnes conditions.

Dessiner et peindre tous ces chats, dont des noirs comme Olympe, m’a aidé à faire de la place pour un après à ses côtés, pour une vie qui continuait et non pas s’arrêtait brutalement. Je crois même que si elle était morte, j’aurais continué ce carnet ; je l’aurais fais vivre dans le monde où elle se trouvait alors. Ce carnet m’a dès lors permis de faire une transition entre les deux facettes de la Vie : la mort et la vie, car, « La mort n’est que le milieu de la Vie » comme le disaient les Celtes. C’est une belle et forte croyance.

J’ai pu laissé libre cours à mon imagination, et c’est bien par elle que de nouvelles voies neurologiques sont créées, faisant ainsi place au neuf, à la transformation.

J’ai pu aussi donner voix à de nombreuses émotions en moi qui seraient sinon restées bloquées.

Peut-être, plus fort que tout, j’ai pu être en paix dans mon coeur.

Cette démarche du carnet de griffonnages thérapeutiques est tout à fait déclinable selon ce que l’on vit de difficile. Elle aide à préserver un équilibre de vie parfois mis à mal et à soutenir une démarche de résilience.